[Ces pages insérées à l’occasion d’une lettre :]
Il y a bien longtemps que ces feuillets sont recopiés et trainent. Ce sont les extraits de mon journal que je vous avais promis(rigoureusement exacts et intégraux) Je pense qu’ils vous amuseront.
[Le premier marqué en marge « déjà recopié »]
Son journal, rien,
Mercredi 17 octobre 1923
Lâche et faible ! J’adore les œuvres qui exaltent le courage, l’ardeur, la vie, les œuvres fières, froides et brûlantes. Il me semblait ce matin que je lirais « St Just » de M. Lenéru avec ivresse ; j’en ressens à l’avance l’âpre plaisir. Barrès, Montherlant – ce Montherlant que j’aime tant, pour ce qu’on en dit et pour la seule page que j’en ai lue l’autre jour dans les Nlles Littéraires : introduction à la vie héroïque : La leçon de stade. Une page merveilleuse, exaltante, une fin qui me comble de joie ; j’aurais du copier cette phrase finale : « l’espérance, cette volonté des faibles … Il y a un instant : qu’il soit à moi » cette admirable fierté ! Marie Lenéru, j’en suis sure, aurait beaucoup aimé Montherlant.
28 janvier 1924
Qu’est-ce que je cherche dans les livres ?
I Une jouissance de qualité supérieure-
II Un accroissement, un enrichissement, un élargissement, un ennoblissement, un embellissement * de mon moi.
III des règles, des indications, des exemples pour étayer mon système d’existence, ma conception de la vie.
Voilà pourquoi j’adore un Barrès, un Montherlant comme Marie Lenéru, encore une fois, l’eut aimé ! Ecouter une âme saine, ayant ce fond de simplicité, etc.
Tout comprendre pour tout exprimer.
« Voilà certes, dit Edmond Jaloux, une belle page et un beau programme à la Goethe. »
A une interview, comme on l’interrogeait sur les ambitions, il répondit : « les ambitions sont la grandeur de mon pays et la mienne propre, ensuite celle de ma religion. »
« Et le triomphe de son moi, M de M. ne le cherche point dans l’intelligence, la pensée, mais dans la volonté. »
On semble lui donner comme pareil Drieu la Rochelle, j’en ignore tout, je le lirai.
Mais dans Month., dont je n’ai lu que qq pages et des vers adorables dans de récentes Nouvelles L. je me suis trouvé un magnifique ami.
* ouf !
[page 2]
- Lire au plus tôt La relève du matin – Le Songe Le paradis qui vient de paraître . Et en voilà un que je pourrai suivre pas à pas. Faites mon Dieu, que ce soit vers la vraie gloire. Celle d’un Barrès.
(à la suite, des considérations religieuses) tout de même comme notre religion nous grandit ! Nous pouvons vivre en plénitude, nous enrichir moralement avec magnificence, du moment que c’est en nôtre âme, nous savons bien que rien n’en sera perdu ! (en note : La religion est ce qu’il y a de plus fort. Elle fait de nous, dès ce monde, des immortels. La mort n’est plus qu’un pont. Etc. M. Lenéru) comment peuvent ils vivre ? qui qui croient au néant. Etc. etc.
28 janvier 1924
Qu’est-ce que je cherche dans les livres ?
I Une jouissance de qualité supérieure-
II Un accroissement, un enrichissement, un élargissement, un ennoblissement, un embellissement * de mon moi.
III des règles, des indications, des exemples pour étayer mon système d’existence, ma conception de la vie.
Voilà pourquoi j’adore un Barrès, un Montherlant comme Marie Lenéru, encore une fois, l’eut aimé ! Ecouter une âme saine, ayant ce fond de simplicité, etc.
Tout comprendre pour tout exprimer.
« Voilà certes, dit Edmond Jaloux, une belle page et un beau programme à la Goethe. »
A une interview, comme on l’interrogeait sur les ambitions, il répondit : « les ambitions sont la grandeur de mon pays et la mienne propre, ensuite celle de ma religion. »
« Et le triomphe de son moi, M de M. ne le cherche point dans l’intelligence, la pensée, mais dans la volonté. »
On semble lui donner comme pareil Drieu la Rochelle, j’en ignore tout, je le lirai.
Mais dans Month., dont je n’ai lu que qq pages et des vers adorables dans de récentes Nouvelles L. je me suis trouvé un magnifique ami.
* ouf !
[page 2]
- Lire au plus tôt La relève du matin – Le Songe Le paradis qui vient de paraître . Et en voilà un que je pourrai suivre pas à pas. Faites mon Dieu, que ce soit vers la vraie gloire. Celle d’un Barrès.
(à la suite, des considérations religieuses) tout de même comme notre religion nous grandit ! Nous pouvons vivre en plénitude, nous enrichir moralement avec magnificence, du moment que c’est en nôtre âme, nous savons bien que rien n’en sera perdu ! (en note : La religion est ce qu’il y a de plus fort. Elle fait de nous, dès ce monde, des immortels. La mort n’est plus qu’un pont. Etc. M. Lenéru) comment peuvent ils vivre ? qui qui croient au néant. Etc. etc.
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[page 2]
- Lire au plus tôt La relève du matin – Le Songe Le paradis qui vient de paraître . Et en voilà un que je pourrai suivre pas à pas. Faites mon Dieu, que ce soit vers la vraie gloire. Celle d’un Barrès.
(à la suite, des considérations religieuses) tout de même comme notre religion nous grandit ! Nous pouvons vivre en plénitude, nous enrichir moralement avec magnificence, du moment que c’est en nôtre âme, nous savons bien que rien n’en sera perdu !
(en note : La religion est ce qu’il y a de plus fort. Elle fait de nous, dès ce monde, des immortels. La mort n’est plus qu’un pont. Etc. M. Lenéru) comment peuvent ils vivre ? qui qui croient au néant. Etc. etc.
Dimanche 3 février. [1924]
… Il est amusant de rapprocher le « simultanéisme » (si je puis employer ce mot) d’Henry de M. (voir le passage copié l’autre jour) du quali d’artifex perso de Barrès « toute nuance nouvelle que prend notre âme implique nécessairement une nuance qui s’efface xxx Notre âme est un terrain trop limité … A Montherlant : Il –que je vive toutes les vies, et que je ne les vive pas à la suite, mais ensemble…
La juvénile foi et la volonté de M. sont plus tentantes, mais Barrès est plus près de la vérité. J’ai failli acheter le Paradis l’autre jour à la gare de Bourg, maman grognait contre les 6,75. Et je ne l’ai pas acheté, puérilement, parce qu’il m’a paru léger et l’ouvrant, j’y ai discerné des caractères énormes. Parfait pour les Yeux faibles, mais il m’a semblé qu’il n’y avait guère de matière dans ce livre. Je me suis réservé pour le Songe.* Du Paradis j’ai lu d’ailleurs qq fragments vu dans le Figaro dernièrement, un autre il y a plus longtemps dans le N. L., une très belle page sur le foot-ball. Ce que ce garçon là écrit est étrangement prenant. Il y a des phrases qui s’enfoncent au plus profond de la chair. Je me souviens de son portrait, très laid (sic) ! mais des yeux qui sortaient du visage, ardents et pleins d’une volonté
Ce rapprochement entre lui et Barrès pcque j’ai re-parcouru cette soirée Bérénice.
* Je n’avais jamais le sou et devais choisir entre mes désirs !
[Page 3]
Vendredi 8 février [1924]
Relu une page de Montherlant dans un Figaro. J'aime ce style ferme, original, et ce tour d'esprit. Je l'aime d'aimer le courage dans la femme et non la faiblesse. De tels hommes nous grandissent, alors que les autres sont de piètres amants ou époux. La femme "faiblette", oui ... avec cela qu'ils la protègent si bien! Si amoureux que M. soit de la vaillance féminine, je sais bien sur lui pourrait s'appuyer. Il y a une façon de s'appuyer qui n'est point celle de ces poupées. Lâche et tremblante, j'ai le goût de la force, de la volonté et de la grandeur. Voilà pourquoi j'aime Henry de Montherlant 'quel beau nom!) qui; ensuite, est un écrivain splendide. Cette autre page sur Barrès, relue aussi. Que c'est beau.
C'est entre nous à la vie à la mort.
Mercredi 20 février
Une belle page de Jacques Guenne sur H. de M. (Nouvelles) "comprenant que dans le désordre fermente la médiocrité! ...(je ne vous recopie pas tout cela, nat. mais tout est recopié, jusqu"à la fin.
Il y a actuellement, à coté des habituels psychologues, réaliste, naturalistes ou exploiteurs de banalités à faire pleurer, deux catégories de jeunes écrivains; ceux qui sont tentés d'européanisme (P. Morand) qui nous offrent de la littérature kaléidoscopique, des œuvres désordonnées, étranges, tout ce que l'on veut excepté françaises. Et les autres qui, tout au contraire, aiment l'ordre, le classicisme, la force morale. Et la plupart de ceux -ci sont catholiques. Plus catholiques que chrétiens alors qu'un Verlaine, un Huysman [sic] étaient plus chrétiens que catholiques. M. est catholique, plus par amour de l'ordre, par dégout de la non-valeur et de l'écœurement actuels, par inclination vers la grandeur que par véritable christianisme peut-être. Il est sans humilité et quelque peu nietchéen [sic] même. Je l'aime. Il y a longtemps que je n'ai contracté une telle admiration, que je n'ai donné une adhésion de mon cœur et de mon esprit aussi entières à un homme. Je serais heureuse, peut-être d'obéir à un tel homme. Je le respecterais. Je voudrais être sa digne compagne et me guérir de ma faiblesse. Une femme supérieure a besoin que son mari soit grand. C'est dommage que M. ne soit pas beau! Car il est laid, une tête trapue, des lèvres avançant, quelque chose d'un dogue. Et des yeux ardents, directs, impérieux, le front haut.
19 mars
... Maman absente aujourd'hui; je n'ai pas fait ce que je voulais faire, j'ai lu ... Le Songe, de Montherlant. Livre bien étrange, tumultueux, splendide et farouche..
Il m'effraie, maintenant, cet homme qui essaie de concilier l'idéal chrétien avec une magnifique dureté. Des pages sur le front qui sont absolument admirables; une sincérité éclatante: (comment voulez-vous écrire, vous recueillir dans cette atmosphère, ma mère, mon père des querelles ... Et quand je le peux, je ne sais pas toujours m'isoler. Parfois je suis violemment attirée vers le dehors, Je sorts bêtement.) J'ai déjà peur de ma solitude là-haut, sans le bourdonnement familier de la maison alentour. Bref - je suis nerveuse ce soir. De ce livre? de mon père? de ces jours fâchés? des tablettes?
Mon livre m'a paru mièvre, mesquin après cette lecture (rapide, ce n'est pas lire.) Si lâche, si petite et mesquine. J'aime la grandeur, la force. Comme celà vous change! Il y a de la fougue sensuelle, du désir, de la violence dans ce livre bizarre. Mais rien d'impur cependant. Pas un livre de J. fille, en tous cas. Comme cela dis-je, nous change des éternelles banalités et mièvreries d'amour. Je ne regrette plus en lisant ça, que mes vers soient dépourvus d'amour. L'amour! tous les poètes ont cette corde à leur arc. Est-ce que mon originalité ne serait pas grande d'être un poète sans amour? de trouver en moi, sans le secours d'aucune tendresse humaine, masculine surtout, de quoi alimenter une oeuvre riche, intense?
(c'est tout ce que mon journal contient sur le Songe - comme quoi, c'est prouvé depuis longtemps, un journal intime n'est qu'un miroir incomplet, sinon infidèle. Et puis, cette re lecture eut lieu en des temps troublés, déménagement hatif, séparation entre mes parents, etc.)
lundi 2 juin (24)
... J'ai peur aussi