C'est le coté festif, agréable que je garde de cette première participation aux journées de l'APA (*1). Eh oui je suis un apaïste, un adhérent de l'association des écrivains et écrivaines de leurs journaux intimes, des spécialistes des biographies à travers l'étude des correspondances, les leurs ou celles déposées et classées par l'APA. Ambérieux-en -Bugey est historiquement le lieux d'archivage et siège "administratif" de l'association fondée par le professeur Philippe Lejeune. C'est à la suite d'un échange (il y a environ une dizaine d'années) au sujet du journal de Hyacinthe Azaïs que j'ai découvert les cahiers de l'association, et me suis délecté des résumés de vies retracées dans ce que l'on appelle ici les "échos". Malgré une présence il y a peut-être cinq ans lors d'une assemblée à Paris rue d'Ulm, suivi d'une table ronde dans la journée, je participais peu aux activités, l'opportunité d'un voyage dans l'Ain m'a attiré et je ne regrette, ni les sujets, ni la manière de les aborder, ni surtout le plaisir des conversations avec tant de gens motivés, dont bien sûr Philippe Lejeune et son regard toujours joyeux et avenant plein de sympathie. Voir le CR officiel ici.
Le sujet de ces journées était "la correspondance".
Ainsi des films basés sur des courriers ponctuèrent les soirées , le premier vendredi des lettres entre famille et soldats (La cicatrice avec la présence du réalisateur Laurent Véray), le second samedi soir courrier et témoignages de marraines de guerre "A mon inconnu que j'aime" lors de la guerre d'Algérie suivi d'un débat animé par Véronique Leroux-Hugon avec le réalisateur Rémy Collignon.
Les occasions de connaissance de projets, travaux personnels ou collectifs furent nombreuses entre convives lors des repas, des ateliers, et des séances de table-rondes.
Parmi toutes ces riches rencontres et sujets, j'ai retenu (surtout) l'intérêt d'une universitaire d’Helsinki sur les ruptures parmi les lettres d'amour dont la base d'archive de l'APA a servi de matière "corpus" à statistique, la présentation intéressante et donnant, dans le contexte actuel de la RGPD, matière à réflexion de la directrice, Marlene Kayen, d'une fondation comparable à l'APA en Allemagne le DTA (Deutsches Tagebucharchiv).
Enfin dans un atelier, Elisabeth Legros-Chapuis nous a superbement présenté à travers une étude de différentes publications de biographies et correspondances de Baudelaire, une synthèse des lettres à sa mère. Le célèbre recueil des Fleurs du Mal n'a pas échappé à la lecture de deux poèmes la concernant, et me touchait particulièrement puisque c'est l'ouvrage le plus recherché dans les illustrés de Mariette Lydis. (Editions Govone 50 ex. sur Japon 11 lithographies 1928, cahier 33 illustrations 1931).
Lorsque, par un décret des puissances suprêmes,
Le Poëte apparaît en ce monde ennuyé,
Sa mère épouvantée et pleine de blasphèmes
Crispe ses poings vers Dieu, qui la prend en pitié :
– « Ah ! que n’ai-je mis bas tout un nœud de vipères,
Plutôt que de nourrir cette dérision !
Maudite soit la nuit aux plaisirs éphémères
Où mon ventre a conçu mon expiation ! »
Je n’ai pas oublié, voisine de la ville,
Notre blanche maison, petite mais tranquille ;
Sa Pomone de plâtre et sa vieille Vénus
Dans un bosquet chétif cachant leurs membres nus,
Et le soleil, le soir, ruisselant et superbe,
Qui, derrière la vitre où se brisait sa gerbe,
Semblait, grand œil ouvert dans le ciel curieux,
Contempler nos dîners longs et silencieux,
Répandant largement ses beaux reflets de cierge
Sur la nappe frugale et les rideaux de serge.
Mais ce qui restera aussi de ces journées, ce sera l'odeur insistante diffusée par les Tilleuls de Hollande en fin de floraison sur la place du centre culturel Espace 1500 où nous étions réunis. Cette odeur est plus originale (même si à mon point de vue moins agréable) que celle du tilleul classique, les mêmes tilleuls décorent (et parfument de cette façon particulière) les alentours de l'église et de la mairie en centre ville, par contre l'agrément n'est pas évident et l'absence de restaurants sympathiques au cœur du bourg est regrettable. L'organisation de ces journées, comme toute action associative doit beaucoup aux bénévoles qui s'en occupent et on doit remercier en particulier le maître d'oeuvre Michel Baur.
*1/ Association Pour l'Autobiographie et le Patrimoine Autobiographique.