Dans les centaines de pages manuscrites, un journal année 1941, Mariette Lydis en pleine réflexion.
14 Juillet 1941 (*1)
Le dernier quatorze juillet je l'ai passé en mer, seule, désespérée --(*2)- Cette année c'est l'hiver. Je suis en Argentine ----
Et une année a passé ------
avec tant d'évènements, tant de solitude, de peine, de désespoir et me voici, à présent, dans une nouvelle existence. Depuis - mois depuis Noël, je n'ai plus senti une douleur au cœur, poignante, aiguë comme la blessure que j'ai reçue aujourd'hui -- vive et déchirante comme une plaie -- C'est de Erica que cela me vient -- d'une phrase contenue dans sa lettre--, "je l'aime -- je l'aime bien -- "
Que signifie la rectification de la deuxième phrase, après avoir écrit la première ?
elle n'arrange rien; cette petite diminution arrive trop tard. La lettre et sa réponse sont contenues dans ce livre qui xxxxxxxx raconte ma vie -- mais ma réponse ne partira pas, mais aussi, comme une autre fois avant (*3) quelque chose est cassé en moi.
Erica ne me semble plus l’Être unique pour moi. Être irréprochable, immuable, Inaltérable elle appartiendra à une autre catégorie à partir d'à présent. Plus la petite mère -- le compagnon éternel, l'ange toujours présent.
notes:
*1 Texte 1 page en français, de sa grande écriture 1 seul mot raturé. (quelques fautes d'accent sont rectifiées à la transcription)
*2 Son départ le 2 juillet 1940 sur le cargo Highland Princess avec ses tableaux. Traversée Southampton-Buenos Aires plus de 11 jours!
*3 Mariette n'aurait tenu son journal que deux années 1940-1941, on ressent le désir de communiquer dans sa solitude, elle recopie des parties de lettres reçues, des projets de réponse. Partagée entre tiraillement de ses anciennes amies très éloignées, les nouvelles amitiés qui se forment, il y a des "crises" des jalousies distantes. Elle se cache aussi en pratiquant des langues que les "locales" ne peuvent lire facilement. Le français, l'italien, l'allemand, l'espagnol alternent selon le correspondant, l'humeur et la discrétion. Ne pas laisser trainer son journal intime. L'habitude de l'écriture n'a pas cessé ensuite, mais ce furent des notes, l'écriture de conférences, de mémos comme pré-articles pour les journaux, les interviews. Puis pour certaines elle les fit taper par sa secrétaire, en diverses langues.
Mais nous sommes en Argentine avec des populations venant du monde, toutes les langues sont pratiquées, les secrets d'alcôves ne devaient pas rester longtemps ignorés.
Mariette Lydis est partie seule, a quitté brusquement l'Angleterre où elle vivait avec son amie Erica Marx depuis un an. Apparemment en abandonnant tout, partie juste avec son caniche Jaquetti.